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Témoignage pour Tinan

Textes d'Aujourd'hui

Témoignage Pour Tinan


Quelques larmes me viennent, tout comme hier, tout comme les jours qui ont suivis la triste nouvelle de ton départ…

Elles coulent sur mes joues sans que je ne puisse cacher ma peine… Maintenant que tu es tout là-haut dans le ciel, Tinan, maintenant que tu n’es plus là…

Pourquoi ? 


Je n’ai plus peur de la mort depuis bien longtemps, elle fait pour moi partie de la vie, ce n’est qu’une porte à franchir, comme la naissance en est une autre… Aussi mystérieuses l’une que l’autre, quand on ne les connait pas encore. Mourir pour moi n'est pas plus triste ou plus difficile que Vivre, c’est une fin de cycle…

Tu es parti dans la joie, sans souffrir, en faisant ce que tu aimais tant, en dansant.

Peut-être même sur une Salsa… Alors pourquoi, Tinan ?

Pourquoi ai-je versé toutes ces larmes, moi, qui ne faisait pas partie de tes intimes ? Pourquoi te demander, une énième fois, la raison de ton départ ?

Et pourquoi si jeune… Si vite ?


Je sais que je connais la réponse Tinan… Seuls les Anges auront la chance de te côtoyer et de recevoir ton enseignement dorénavant… Alors, j’ai de la peine… Pour moi, pour nous, pour tes proches qui vont devoir apprendre maintenant à vivre sans toi…

Je ressens tant de tristesse en pensant aussi à toutes mes connaissances qui auraient pu te connaitre et t'apprécier Mais elles ne pourrons pas te rencontrer et n’auront jamais droit à tes lumières… Plus dans ce monde là.


Dans ma tradition culturelle et religieuse, on dit que ceux qui quittent ce monde, jeunes, sont ceux qui ont déjà réalisé sur Terre ce qu'ils venaient y faire…

C’est donc cela, Tinan ? Tu as finis ce que tu étais venu faire ?

Et comme tu es plus doué que nous autres, tu as terminé bien avant le temps imparti…

C’est pour cela Tinan ?

Maintenant que tu swings avec les étoiles, j'espère que ton âme sera en paix et que tes œuvres sur terre rappelleront ta mémoire à jamais.

Ce fut un honneur de partager avec toi, Tinan, je ne t'oublierai pas et je parlerai de toi…

Je raconterai ce que tu m’as appris et surtout l’Homme que j’ai connu…

Peut-être bien que quelques uns de mes récits ressemblerons à celui qui suit…




Témoignage pour Tinan



Je me souviens d'un temps, pas si lointain, ou la musique a sauvé ma vie, cela peut paraitre excessif, mais c’est pourtant la vérité.

Il s’agissait d’une musique très particulière, la Salsa. Je l’appréciais depuis quelques années déjà, tout comme la danse, mais cette année-là, je lui suis devenu reconnaissant à jamais.

C'est le moment qu'a choisi un Homme pour entrer dans ma vie musicale, à vrai dire, cet homme n’avait rien demandé du tout, il ne faisait que partager sa passion de la danse et de la musique, en enseignant de ci, de là, ce qu’il aimait et connaissait si bien.

Mais pour moi et ma passion naissante, je rencontrais enfin l’Homme qui allait véritablement me faire comprendre cette musique et me la faire apprécier si différemment. Je rencontrais celui qui allait m’en révéler tant de splendeurs, moi qui étais si ignorant…

Cet homme, c’était Tinan !

Little Kris l'avait invité à SoDance pour un stage de musicalité.


C’est ainsi que je fis sa connaissance et depuis ce jour, je l’ai aimé…

Son savoir certes, mais surtout, lui, l’Homme qu’il était…

Je l’ai ressenti et compris immédiatement. Je me souviens que mon amie Jess était avec moi ce jour-là et, elle aussi, a aimé Tinan.

Je compris alors que cet Homme avait un pouvoir particulier qui ne s'exerçait pas que sur moi… Tinan avait le pouvoir de se faire aimer presque immédiatement, par n’importe qui… Il lui suffisait d'être Lui et pour nous de le rencontrer, ne serait-ce qu’une seule fois…

Et il faisait irrémédiablement parti de notre clan.


Depuis le jour ou je l'ai rencontré, je suis devenu un vrai Salsero, et j'ai commencé à suivre les stages de Tinan. Il m'a fait redécouvrir la Salsa, la musique certes, mais aussi la Danse. Avec lui, j’ai décodé le Son, le Son Montuno, le Cha-cha-cha, le Guaganco, la Pachanga, la Timba, la Dura, le Bougaloo, la Romantica, le Latin Jazz, la Pachanga, le Mambo…

Tant de Salsas différentes et puis la Rumba aussi, avec toutes ses variantes.

Il nous racontait l’histoire de la salsa colombienne, pourquoi elle était si rapide…

J’en souris encore.

Il m’a appris à danser sur le 1 et puis sur le 2 et puis tant d’autres choses, tant de subtilités cachées dans toutes ces musiques que j’aimais. Je lui dois également la rencontre de beaucoup de gens, Ariane, Lucia, Quentin, Minh, Nadia…

J’ai presque envie de dire que je me considère comme un enfant de Tinan, même si pourtant, je suis bien plus âgé que lui.


Je me souviens de ce que me disais Tinan avec son éternel sourire et cette voix si douce…

« Il n’y a pas de salsa cubaine ou de salsa portoricaine Didier, c’est une invention commerciale… »

Et il m’expliquait, « il y a plus de vingt Salsa différentes Didier, elles ont toutes la même structure musicale, basée sur la clave en 3/2 ou en 2/3, après c’est une question de feeling personnel et de savoir à un instant « T » comment tu la ressens et comment tu veux la danser, si tu veux suivre la ligne mélodique ou les instruments…

Ecoute uniquement la musique Didier, ressens là, et danse là comme tu le voudras, ne sois pas l’esclave de DJs ou de dogmes qui n’ont pas lieu d’exister. »

Je lui disais, « Tinan j’ai essayé de véhiculer ton enseignement mais les gens ne veulent pas me croire et me parlent toujours de salsa portoricaine ou de cubaine à la moindre Dura ou Timba qui passent, que puis-je faire ? »

Il me répondait dans un sourire, « Tu n’as pas le titre de musicien Didier et tu n’as pas encore le savoir qui fait référence, alors c’est normal que les gens ne t’écoutent pas mais ne te bile pas, quand il y a des gens comme çà, adresse les moi, et moi je leur répondrai ».

Je lui disais, « Tu répondras à tout le monde, Tinan ? »

« Oui me disait-il, si çà peut faire avancer la musique, alors oui, n’hésite pas à me les adresser ».


Je me revois lui criant au cours d’un stage,

« çà y est Tinan, je danse sur le 2, çà y est Tinan… »

« Oui Didier, tu y es presque, mais là, tu es entre le 1 et le 2 et c’est même toujours un peu plus le 1… Attends juste encore un petit peu, écoute les congas Didier…

Tum Tum … Tum Tum… Allez, vas-y, c’est maintenant… ».

Je le revois me disant, « La cloche n’arrive que rarement en début de musique Didier, comment vas-tu danser en l’attendant ? … Méfie-toi du piano, c’est un faux ami, ne lui fais aucune confiance, Didier… »


Je m’entends encore lui répéter, « Tinan, je démarre toujours sur le 5, je ne sais pas pourquoi, mon oreille est formatée comme çà, je ne me trompe jamais, mais c’est toujours sur le 5… » … « Ce n’est pas grave Didier, danser sur le 5 ou le 1 c’est pareil, presque pareil, çà ne change rien, n’écoute pas ce que l’on te dira et continue comme çà… ».

Je me souviens aussi de grands moments de désespoir, « Tinan, je n’arriverai jamais à danser sur le 2, mon oreille est trop esclave du 1, j’aime trop la mélodie, je n’y arriverai pas… » … « Ecoute Didier, TUM TUM, Pac… TUM TUM, Pac… Tu vois… Tu danses sur le 2 maintenant… » … « Tu es prêt pour le Cha-cha… Et puis aussi le Son… » … « Mais je n’y arriverai jamais Tinan, je n’arrive pas à marquer les 4 et les 8, je n’y arriverai pas… »

« Attends la fin des deux heures Didier et tu verras que tu y arriveras… »

Et il avait encore raison… 


Et puis, on a parlé de sa blessure…

J'ai acheté son livre, Magnitude 7.3… Il me l’a dédicacé…

« A Didier, une invitation à découvrir mon univers de musique, de soleil et d’émotions. Tinan »


Et puis un jour, il m’est arrivé un événement étonnant…

Je succombais à une révolution tant musicale que de danse… Je me suis transformé…

Moi, qui dénigrais tant la Bachata (c’était trop Ouin-Ouin, trop Cucul)…

Eh bien, je suis devenu Bachatero ! 

Je m’en souviendrai longtemps, c’était après le festival mondial de Bachata qui avait lieu à Madrid, le Bachatea. J’y avais rencontré mes futurs amis, que je n’ai plus quittés depuis.

Ce fut un tournant dans ma jeune vie de danseur car j’allais délaisser officiellement la salsa que j’aimais tant. Devenu Bachatero, je n’en ai pourtant jamais oublié Tinan et encore moins son enseignement…


Je fis mon dernier stage avec Tinan, quatre jours avant d’aller à ce congrès, il est resté dans mon esprit comme mon dernier instructeur de Salsa… Tant que la Salsa était pour moi la priorité absolue, Tinan était "Le Maitre de Danse" !

Je me souviens bien de ce jour-là, après un apprentissage de la Pachanga, Tinan nous fit découvrir la Rumba avec ses multiples variantes. J'apprenais dans de folles rondes à vacciner les filles d’un simple mouchoir rouge. Je craignais tant le ridicule, mais de ridicule, il n’y en eut pas… Je me revois m’écriant, « Pas assez rapide, jolie danseuse, je t’ai eu, tu es vaccinée, maintenant… » 


Ce jour-là, je découvris aussi Tinan incarnant ce Dieu guerrier, dont j’ai oublié le nom, dans son travail de destruction, frappant autour de lui avec sa machette imaginaire.

Qu’il était beau Tinan ce jour-là, il était le Dieu guerrier, celui que j’allais suivre, abandonnant ma pudeur et mes tabous…

Imitant Tinan, je devenais à mon tour le Dieu guerrier…

Que Tinan était beau ce jour-là ». 



Que puis-je dire de plus ?

Peut-être vous parler de lui, de l'Homme que j'ai perçu…

J’ai aimé Tinan…

Du premier jour où je l'ai rencontré, jusqu’au dernier, je l’ai aimé.

Il n'était pas pour moi qu'un grand danseur ou qu'un grand musicien ou qu'un témoignage, par son parcours de vie, sur la réalité de l'adoption… Il y a beaucoup de grands danseurs, beaucoup de grands musiciens et malheureusement beaucoup d'histoires de vies douloureuses. 

Certes c'était un vrai surdoué… Mais moi je ne retiens pas ça et même si je ne suis pas la meilleure personne pour parler de lui car je ne l'ai pas connu assez, je l'ai connu suffisamment pour dire que ce que Tinan avait d'exceptionnel et de rare c'était tout simplement, LUI, ce qu'il était en tant qu'Homme !


Tinan, c'était un sourire omniprésent, une voix si douce, une patience inlassable, une gentillesse tellement rassurante et réconfortante. Il avait un univers à lui fait de sagesses, de musiques et de danses. C'était quelqu'un pour qui, il n'y avait jamais rien de grave et rien d'impossible, c'était un donneur d'espoir qui te poussait à aller plus loin, à te surpasser, toujours en douceur…

Ce que Tinan avait d'exceptionnel, c'est qu'il était un cœur aimant, si généreux, si bon. Un de ces êtres qui vous rend meilleur et qui vous calme par sa seule présence, c'était un sage, un thérapeute de l'âme, un Homme comme on en rencontre pas souvent. Un de ces Hommes extraordinaires vivant pourtant comme l'homme le plus ordinaire.


Tous les témoignages que l'on voit et entend sur lui aujourd’hui, montrent à quel point sa lumière était puissante. Maintenant qu'il est parti pour un autre voyage, je pense à ses proches qui le pleurent… Ma peine et mes larmes ne sont rien par rapport aux leurs…

J'espère que Tinan de là-haut pourra les apaiser.

Quant à nous autres qui avons eu la chance de le croiser, il ne reste qu'à l'accompagner par la pensée et prier pour que son âme soit maintenant en paix et lui dire Merci pour tout…

Je ne t’oublierai pas, Tinan, je parlerai toujours de toi…

Puissent les Anges plaider en ta faveur et t’accompagner maintenant…


Tu étais mon Maitre de musiques et mon Maitre de danses…


Soit béni à jamais.




Didier


COMMENTAIRES

Jess Tih Cabri <jess.charbit@free.fr>

(vendredi, 07. novembre 2014 15:20)

Si précieux Didier…

j'ai différé la lecture de ton écrit parce que mes larmes n'en finissent plus de sillonner mon visage, le plus souvent dans la carcasse de ma voiture qui va bientôt couler
d'ailleurs, à l'abri des regards… Je ne supporte plus mon taf, je me force pour continuer les cours de danse mais ils sont bp plus pénibles que bienfaisants pour le moment, je pleure en y allant, je pleure en repartant, bref, une vraie chouineuse..."Ne me secouez pas, je suis pleine de larmes", cette phrase si belle est tellement vraie actuellement…

J'ai la tête farcie d'images, de résonances douloureuses (ce qui ne forme pas un joli son) et le plus stupide peut-être, c'est que je me sens gênée par ce chagrin cristallisé, criant et indicible parce que, comme toi, je pense à ses tout proches et c'est comme si je me disais que la "magnitude" de ma peine, pour reprendre ses mots, était un peu illégitime...

Enfin, je suis sûre que tu comprends et je me dis que non, en fait, on n'a
pas à en éprouver de malaise, c'est ce petit génie de l'humanité qu'il avait en lui qui fait que l'on se sent si proche de Tinan... Sa douceur, son écoute patiente et attentive, son art de transmettre, son humilité , son intelligence lumineuse de tout… un petit lutin brillant qui éclairait tellement, d'une simple étincelle… Je ne suis pas croyante mais j'aimerais tellement que tu aies raison… Ton récit est très beau Didier, il est tellement vivant et authentique… Tu es un vrai conteur, sensible et vrai, merci <3


Ariane <arianebtl@gmail.com>

(samedi, 08. novembre 2014 18:00)

<3



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